E-nano : La récolte de données automatisée

Publié le 6 décembre 2022 à 07h00

Catégorie : Recherche & innovation

Créée en 2020 par 4 ingénieurs, l’entreprise E-nano a développé une solution automatisée de récolte de données sur les gazons sportifs. Leur robot et leur plateforme, SPROUT et OSCAR, fonctionnent déjà.

C’est l’histoire de quatre ingénieurs spécialisés dans l’automatisation et la robotique qui ont pour ambition de créer et développer leur propre robot afin de collecter des données. Si initialement, c’est le secteur agricole qui était visé, les 4 co-fondateurs de l’entreprise E-Nano se sont rapidement tournés vers le monde du gazon sportif sous les recommandations de la STRI. « De fils en aiguilles, nous avons obtenu des financements du gouvernement anglais, nous avons été mis en relation avec la STRI, qui est désormais notre partenaire, qui nous a aiguillés vers les terrains de sport », confie Erwan Lompech-Leneveu, un des fondateurs français.

L’idée de base est simple : à l’aide d’un robot, l’intendant doit être capable de récolter un maximum de données sur son terrain et d’obtenir des rapports précis et illustrés de ces données. Pour ce faire, E-Nano a développé une solution en 2 parties. La première se nomme SPROUT, le robot chargé de récolter la data sur la surface de jeu à l’aide de 5 outils de mesure :

  • Capteur d’humidité et de température (humidité et température du sol)
  • Caméra thermique (température de surface)
  • Pénétromètre (compaction du sol)
  • Clegghamer (dureté du sol)
  • Set de caméras et capteur multi-spectral (NDVI (Indice de végétation par différence normalisée) et couverture du gazon)

« Nous ne sommes pas développeur de capteurs. Nous avons donc intégré un capteur d’humidité d’une autre entreprise dans notre mécanisme. C’est l’approche qu’on priorise pour notre robot. Nous essayons de garder les outils qui sont des standards dans le milieu », précise Erwann Lompech-Leneveu.

La seconde partie de la solution est la plateforme d’analyse de données intitulée OSCAR, accessible via smartphone/tablette/PC. Elle est avant toute chose l’outil par lequel commander et programmer le robot, du nombre de points de récoltes à leur localisation en passant par le minutage de chaque opération. Plusieurs surfaces de jeu et zones de récolte de données peuvent y être enregistrées. Grâce aux données récoltées et à leur localisation, il est possible pour l’utilisateur d’avoir des rapports cartographiés du terrain et d’autres informations d’aide à la décision.

La mesure des données à un point dure environ 30 secondes. « Pour un terrain de foot, il est possible de faire 60 points par heure. Pour vous donner un ordre d’idée, les clubs de foot cherchent à collecter des données sur 20-30 points, idéalement une cinquantaine. Des organismes comme la FIFA sont plus exigeants et tendent vers les 100 points par terrain, ce qui prendrait 1h20 avec SPROUT. » Pour 20 à 30 points réalisés manuellement, cela prendrait au moins une à deux heures. Si le gain de temps est conséquent, E-Nano n’en fait toutefois pas son argument principal. « L’argument n’est pas de dire qu’on fait économiser du temps pour le même résultat mais plutôt qu’avec le même temps le résultat obtenu sera bien plus précis », cadre Erwann Lompech-Leneveu.

Conception, fonctionnement et prise en main du robot

Quatre roues, une structure métallique au design simpliste, l’aspect physique du robot SPROUT n’a rien de révolutionnaire. Et c’est un choix clairement assumé par l’entreprise. « Nous souhaitions une solution assez légère pour ne pas marquer les surfaces de jeu. Nous avons réalisé une base simple, en laissant assez de place aux batteries pour que le robot puisse fonctionner longtemps », indique l’un des quatre ingénieurs.

Le robot SPROUT fonctionne grâce au système GPS RTK. Il est donc nécessaire d’installer une balise RTK à proximité. Au total, le déploiement du robot se fait en 5 minutes. Il peut fonctionner avec la WIFI mais aussi la 4G et 5G. A chaque point donné, le mécanisme arrière s’enclenche pour faire pénétrer les outils de mesure dans le gazon. En parallèle, des caméras placées sous le robot prennent des photos du gazon, en couleurs et infrarouges.

Si pour l’instant, le retour du robot vers son espace de stockage n’est pas automatisé, il le sera à terme. Idem pour la recharge des batteries. « Aujourd’hui, ce sont les seules actions que l’utilisateur doit faire lui-même. Lorsque le robot a terminé son programme, l’utilisateur doit le piloter manuellement pour le ranger et brancher sa batterie », explique le co-fondateur.

La plateforme OSCAR

Le travail du robot doit être paramétré sur la plateforme OSCAR à l’aide d’un smartphone, une tablette ou un PC. Dans un premier temps, l’utilisateur doit, sur la carte satellite, délimiter une ou plusieurs zones de travail pour le robot. Il faut ensuite choisir et placer les zones de récoltes de données, soit manuellement ou alors en utilisant un programme prédéfini.

La section « Tasks » permet à l’utilisateur de choisir les différentes données à récolter. Il est également possible de programmer le travail du robot à une date et une heure ultérieure. 

Lorsque le robot a récolté les données, l’utilisateur a accès à un rapport détaillé

Pour l’exemple ci-dessus, une cartographie de l’humidité du terrain a été générée. Plusieurs informations sont également disponibles telles que la température du sol, la température de surface, la compaction, etc. Pour chaque donnée, une cartographie et un graphique sont accessibles.

Il est également possible d’avoir les données récoltées à un point précis en cliquant sur ce dernier sur la carte satellite présente à droite. Lorsqu’un point est sélectionné, la photographie prise s’affiche.

La plateforme permet également à l’utilisateur de cartographier la zone où les données ont été récoltées selon des paramètres sélectionnés. Pour l’exemple ci-dessous, grâce aux moyennes des différents taux d’humidité mesurés, il est possible de cartographier la carte satellite pour avoir visuellement les zones plus ou moins humides.

L’évolution dans le temps des différentes données est également retranscrite dans des graphiques.

 

Des références et des partenaires de choix

La plus grosse variation en fonction des sports concerne le type de capteurs à intégrer au robot. Les terrains de football, de rugby, les parcours de golf et les pistes hippiques ne sont pas confrontés aux même problématiques. « Pour le football, nous travaillons étroitement avec la FIFA afin de remplir tous les critères de collecte de paramètres intéressants pour élaborer ses rapports de terrain. On s’attèle à automatiser toute la prise de mesure. La FIFA est en quelque sorte un référentiel au niveau des normes qualitatives. Le monde du rugby et la NFL suivent de près la FIFA », confie Erwann Lompech-Leneveu. Outre le football, l’entreprise souhaite répondre aux besoins des hippodromes, dans lesquels les paramètres à collecter et les surfaces à couvrir sont différents. Pour répondre au mieux à ces problématiques, l’entreprise travaille en collaboration avec des hippodromes britanniques. La STRI (Institut de recherche sur le gazon sportif) est aussi un partenaire de choix d’E-Nano. 

Après avoir développé 3 itérations de robot depuis le début de leur aventure, les 4 ingénieurs sont désormais en mesure de proposer leur solution, quand bien même la chaine de production n’est pas encore industrialisée. « Nous en sommes au stade de MVP : Minimum Viable Product. Nous avons nos premiers utilisateurs. Mais nous cherchons à améliorer le robot, à le rendre plus simple de fabrication afin d’en faire de séries plus larges », ajoute Erwann Lompech-Leneveu. Le robot et la plateforme se veulent évolutifs. Dans l’éventualité où un nouvel outil de mesure se développait sur le marché, l’équipe d’E-Nano serait en mesure de l’intégrer à sa solution.

Alors que l’entretien des gazons sportifs est de plus en plus tourné vers la data, l’entreprise E-nano éveille l’intérêt de plusieurs pays en recherche de solutions pour palier à l’interdiction prochaine des produits phytosanitaires. Pour l’heure, E-nano tente de se développer et est en pleine phase de levé de fonds pour ouvrir un bureau en Europe. 

La Lightbox : un système de notation de pelouse automatisée

La Lightbox est un outil à part qu’E-Nano a développé et qui permet d’attribuer une note à une pelouse. Il peut également indiquer le pourcentage de gazon en bonne santé sur une surface. Il peut être intégré à la solution SPROUT mais a également été développé de manière différenciée pour être accessible et utilisable par des personnes n’ayant pas l’utilité du robot. « Notre projet est de faire, en quelque sorte, une fusion des deux solutions. C’est-à-dire de robotiser la Lightbox. »

 

La machine a la capacité, à l’aide d’une caméra et d’un algorithme créé par les 4 ingénieurs, de noter la pelouse sur les mêmes critères que les agronomes. « Les agronomes notent les pelouses uniquement par l’aspect visuel. Ils vont juger de manière subjective, d’un consultant à un autre le score peut changer. La pelouse est notée de 1 à 10 selon différents critères visuels : densité, verdure, etc », explique l’un des fondateurs.

Corentin RICHARD

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