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De l’école au terrain : regards croisés entre apprentis et jeune professionnel

Publié le 19 mars 2025 à 11h15

Catégorie : Pratiques

David Puy et Amaury Isabel sont en formation dans le CS Sols sportifs engazonnés au Lycée horticole de Lyon Pressins (69). À leurs côtés, Elio Ibanez, jeune professionnel récemment diplômé de ce cursus, partage également son expérience et sa vision d’un métier peu mis en avant.

Elio Ibanez (Parcs & Sports au centre d’entraînement de l’OL), jeune diplômé du CS Sols Sportifs Engazonnés, ainsi qu’Amaury Isabel (Golf du Beaujolais) et David Puy (centre d’entraînement de l’ASSE), actuellement en apprentissage au Lycée horticole de Lyon Pressins.

Qu’est-ce qui vous a attirés vers le métier de greenkeeper/groundsman ?

Elio Ibanez (EI) : Depuis petit j’ai toujours été attiré par les pelouses des grands stades que je voyais à la télé ou bien même quand j’allais au stade de la Meinau avec mon père voir mon club de cœur le RC Strasbourg. Mais également le week-end lorsque j’allais jouer au foot : le terrain était presque une priorité pour moi.

Amaury Isabel (AI) : Par hasard, après mon BAC STMG je cherchais à me diriger vers une formation dans le paysage, j’ai trouvé une annonce au Golf du Gouverneur. C’est là que j’ai trouvé une passion, grâce au cadre, la technicité et l’équipe qui m’entourait. Ce qui m’a donné l’envie de devenir greenkeeper.

David Puy (DP) : Avant tout le fait de travailler en extérieur. J’ai toujours aimé le sport et j’ai vite compris que la qualité des terrains avait un impact énorme sur la performance des joueurs et le bon déroulement des compétitions. Il y a aussi une satisfaction particulière à voir un terrain impeccable et à savoir qu’on y a contribué.

Comment avez-vous découvert cette filière et qu’est-ce qui vous a convaincus d’en faire votre métier ?

EI : J’ai découvert cette filière en discutant avec mon formateur de Bac Pro Aménagements Paysagers, puis en apprenant l’existence de cette filière j’ai fait mes recherches sur internet, notamment sur le site de l’ONISEP afin de voir où se trouvaient les écoles qui enseignaient le CS Sols Sportifs Engazonnés. Ensuite ce qui m’a convaincu d’en faire mon métier est le fait que je pouvais mêler le paysage et ma passion, le football.

AI : Grâce à une association nommée « Passerelle en Dombes » qui partage ses réseaux professionnels auprès des jeunes pour faciliter l’échange avec une entreprise. Ce qui m’a convaincu de rester dans le monde du golf est le cadre du lieu, mêlé entre rigueur et nature, ainsi que la complexité du travail des sols sportifs.

DP : Au départ, c’est par intérêt pour le paysage que je me suis dirigé vers un baccalauréat en aménagement paysager. Avec le temps, j’ai pris goût à ce domaine, mais j’ai vite compris que le métier de paysagiste n’était pas fait pour moi. J’ai alors cherché une formation qui me permettrait de concilier mon attrait pour le paysage avec ma passion pour le sport. C’est ainsi que j’ai découvert la formation d’intendant de terrains de sport, qui correspondait parfaitement à mes attentes. L’aspect technique et précis de l’entretien des gazons m’a convaincu d’en faire mon métier. Comprendre comment les entretenir, les soigner et optimiser chaque détail pour obtenir des surfaces engazonnées d’exception m’a vraiment passionné. Ce n’est pas juste une question de tonte, mais un véritable savoir-faire qui demande de la rigueur et une bonne connaissance des sols, du climat et des techniques d’entretien.

 

Comment se passe votre formation et quels aspects vous intéressent le plus ?

EI : J’ai terminé ma formation en juillet 2024 qui s’est conclue sur l’obtention du diplôme. J’ai effectué mon apprentissage sur 2 types de terrains de football : les terrains amateurs/municipaux et les surfaces  » élites  » sur les infrastructures du Racing Club de Strasbourg. L’entreprise où j’étais opérait sur les 2. Cela m’a permis de pouvoir connaître 2 challenges différents avec des budgets, objectifs, substrats, etc… qui ne sont pas les mêmes. Aujourd’hui j’ai quitté mon Alsace natale depuis septembre pour venir travailler sur les terrains de l’Olympique Lyonnais pour le groupe Parcs & Sports.

Pour parler de ce qui m’intéressait le plus durant la formation, la fertilisation ainsi que la régénération des surfaces sont vraiment les 2 points que je trouvais le plus important car nous sommes l’une des premières générations qui devra s’adapter au Zéro Phyto et je trouve important d’être sensible à cela afin de trouver de nouvelles méthodes de travail. Ensuite, bien évidemment les opérations classiques (tonte, traçage) sont vraiment très importantes pour ma part car le résultat est immédiat et c’est également la  » Première de couverture » de notre travail.

AI : La formation se passe super bien. Elle m’a permis d’enrichir et de confirmer mes compétences et connaissances. Je suis en apprentissage au Golf du Beaujolais. Un des aspects qui me plait le plus dans la formation est le fait de se déplacer à travers plusieurs terrains sportifs (golf, terrain de foot/rugby, hippodrome) et d’échanger avec les différents opérateurs/greenkeeper sur leurs visions de l’entretien et comprendre qu’il n’y a pas qu’une seule bonne manière d’entretenir un site.

DP : Ma formation se déroule très bien jusqu’à présent. Nous avons la chance d’être encadrés par d’excellents formateurs qui maîtrisent parfaitement leur domaine, que ce soient les techniques d’entretien, la gestion des sols, l’arrosage ou d’autres aspects clés du métier. En étant en apprentissage au centre d’entrainement de l’AS Saint-Etienne, ce qui me plaît le plus, c’est la possibilité d’appliquer concrètement sur le terrain tout ce que nous apprenons en cours. Cela permet de mieux comprendre les gestes techniques et de voir directement l’impact de notre travail sur la qualité des surfaces engazonnées.

Quels sont les plus grands défis que vous avez rencontrés en apprentissage ?

EI : Les plus grands défis que j’ai rencontrés sont les suivants. D’un côté sur les terrains amateurs c’était de proposer des surfaces jouables et esthétiques avec des opérations moins régulières voire pas du tout faites (remise en état, rénovation ), et de l’autre devoir préparer une surface parfaite notamment d’un point de vue esthétique, confort, et résistance. Car sur ces terrains il y a des facteurs qui s’ajoutent également tels que la médiatisation, les exigences des joueurs et du staff. Mais également d’un point de vue théorique c’était d’amasser toutes les données en rapport avec les surfaces sportives engazonnées ( le sol, la maîtrise des machines, savoir quoi faire à quel moments, différents engrais, l’arrosage, etc… )

AI : En apprentissage l’une des plus grandes difficultés est de faire entendre notre avis sur certains points techniques, et sur certaines situations comprendre qu’il faut savoir adapter ce qu’on apprend en cours sur le terrain, qu’il y a une différence entre l’idéal sur le papier et l’exécution.

DP : L’un des plus grands défis est de s’adapter aux conditions météorologiques. Un terrain doit être parfait, qu’il pleuve, qu’il fasse très chaud ou qu’il gèle. Il faut savoir anticiper et réagir rapidement. Une autre pression dans ce métier est l’exigence constante qu’il faut avoir pour fournir une surface impeccable aux sportifs. Chaque détail compte. Les joueurs attendent des conditions de jeu optimales. Cela demande une rigueur permanente et une capacité à réagir rapidement aux aléas climatiques ou aux sollicitations intensives des terrains.

 

Vous avez tous les trois travaillé sur des sites différents (golf, football, multisports). Quelles différences avez-vous observées dans l’entretien des surfaces sportives ?

EI : Personnellement je n’ai pas travaillé en golf mais uniquement sur terrains de foot. Mais de mon point de vue l’entretien en golf est beaucoup plus important en termes de quantité mais aussi très bien en qualité justement pour rejoindre le football professionnel avec le confort pour le joueur. Cependant le travail en surfaces sportives est différent avec des terrains beaucoup plus sollicités et mis à plus rude épreuve avec les tacles nombreux après un entraînement ou un match. Et devoir remettre le terrain en parfait état pour le lendemain ou le prochain de match.

AI : Les moyens. Sur un terrain de foot ou de rugby, les moyens sont focalisés sur une plus petite zone comparée à un golf où la surface d’entretien est plus grande.

DP : J’ai plus d’expérience sur les terrains de sport que sur les parcours de golf, mais je sais qu’en général, les terrains de sport disposent de plus de moyens que les golfs. En revanche, l’entretien d’un golf est plus vaste et complexe, car il ne se limite pas uniquement aux zones de jeu : il y a une gestion beaucoup plus importante des espaces verts, des fairways aux roughs, en passant par les bunkers et les greens. À l’inverse, sur un stade fermé, l’entretien est plus ciblé et centré principalement sur la qualité de la pelouse.

Pensez-vous que ce métier est assez connu et valorisé auprès des jeunes ?

EI : Non je ne trouve pas qu’il soit assez connu. En effet, les écoles proposant des diplômes pour ce métier se comptent sur les doigts de la main… Je trouve qu’il n’est pas assez mis en avant à côté des autres filières du paysage ou du monde agricole, et pourtant c’est une branche remplie de ressources avec une utilité importante car c’est un métier de l’ombre.

AI : Malheureusement non. La plupart des personnes à qui je parle de mon métier ne le résument qu’à tondre.

DP : Non, et c’est dommage, car beaucoup de gens pensent que l’entretien d’un terrain de football se résume à tondre la pelouse et reboucher les trous. En réalité, c’est un travail bien plus complexe qui demande des connaissances. Chaque détail compte pour garantir une surface de jeu optimale tout au long de la saison. Je pense que la formation mérite encore d’être davantage mise en avant, car on constate un réel manque de personnel, aussi bien sur les terrains de sport que sur les parcours de golf. Il y a une vraie demande dans ce secteur, mais le métier reste encore trop peu connu. Mieux le promouvoir permettrait d’attirer plus de jeunes et de passionnés vers cette filière en pleine évolution.

 

Quelles compétences vous semblent essentielles pour réussir dans ce domaine ?

EI : Une des compétences les plus importante est d’abord l’humilité, elle est primordiale à mes yeux notamment dans le football professionnel avec les médias, le cadre, et les personnes que l’on fréquente au quotidien. Car malheureusement aux yeux de ces personnes le métier n’est pas reconnu à sa juste valeur alors qu’il est essentiel voire dans les plus importants. Ensuite la concentration est également importante car cela reste des surfaces qui sont fragiles où bien des erreurs peuvent se voir visuellement ou même impacter le jeu. Enfin, être passionné est également une chose importante.

AI : Il faut être curieux, intéressé et investi. Je rajouterai autonome sur un parcours de golf car sur plusieurs hectares il est difficile d’être constamment en contact avec quelqu’un, il faut donc savoir se gérer.

DP : Pour moi, les qualités essentielles pour réussir dans ce métier sont la rigueur, la patience et la passion pour le sport. Il faut aussi aimer travailler en extérieur, car les conditions peuvent être exigeantes, que ce soit sous la pluie, en pleine chaleur ou par temps froid. C’est un métier qui demande de la précision et une vraie attention aux détails pour garantir des surfaces de jeu toujours impeccables.

Y a-t-il un aspect du métier que vous aimeriez voir évoluer ou s’améliorer à l’avenir ?

EI : Je n’ai qu’un an et demi d’expérience dans donc je trouve que je n’ai pas encore assez de recul pour proposer des choses qui peuvent faire évoluer le métier. Peut-être mis à part la reconnaissance du métier.

AI : Bien sûr, notre secteur de travail est très souvent critiqué et jugé, surtout sur l’aspect écologique, sans vraiment connaître ce que nous faisons.

DP : J’aimerais que l’aspect écologique continue de s’améliorer dans notre métier. La loi Labbé a été mise en place dans ce but, mais nous avons longtemps été trop dépendants des produits phytosanitaires. Pourtant, il existe aujourd’hui des alternatives plus durables, comme certaines opérations mécaniques qui permettent de prévenir et de contrer les maladies du gazon sans utiliser de traitements chimiques. Il faut continuer à développer ces pratiques pour rendre l’entretien des terrains plus respectueux de l’environnement.

 

Que diriez-vous à un jeune qui hésite à rejoindre cette filière ?

EI : Être un passionné de sport, avoir du mental pour la pression à gérer dans certaines situations et ne pas avoir peur de quitter sa famille, ses amis, et sa terre natale pour faire le métier que l’on aime car il y a vraiment des moments incroyables et on rencontre des personnes formidables qui nous apportent beaucoup.

AI : Notre filière est un monde rempli de connaissances, parfait pour les personnes qui aiment être en extérieur et le milieu sportif.

DP : Je lui dirais que s’il est passionné par le sport et qu’il aime travailler en extérieur, alors ce métier est fait pour lui. C’est une profession enrichissante qui allie technicité, nature et proximité avec le monde du sport. Chaque jour est différent, et il y a une vraie satisfaction à voir le résultat concret de son travail sur le terrain.

Si vous deviez résumer votre passion pour ce métier en une phrase, laquelle serait-elle ?

EI : J’aime mon job plus que tout pour le cadre, et les moments extraordinaires que l’on peut vivre au plus près en tant que fan de foot depuis toujours.

AI : La satisfaction de fournir à des clients un jolie parcours/terrain, il n’y a rien de mieux !

DP : Transformer la nature en un terrain de jeu parfait, où chaque détail compte pour la performance et le plaisir des sportifs.

Corentin RICHARD

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