Franck Nicolas : Il vaut mieux un travail plus important mécaniquement plutôt que d’essayer de lutter contre l’environnement avec des produits chimiques"
Publié le 10 février 2020 à 10h56
Catégorie : Pratiques
Franck Nicolas, Pitch Manager du Stade Louis II à l’AS Monaco, a développé un système semis en poquets avec des stolons de « bermuda grass ». Il explique dans cette vidéo comment a germé l’idée et la mise en place de ce système. Il revient également sur le paradoxe de la pelouse du Stade Louis II qui se situe sur le toit d’un parking souterrain et également de la façon dont il gère la pyriculariose.
Franck Nicolas, référent pelouse du Stade Louis II à l’AS Monaco, nous expliquait, dans cet article,comment il a imaginé d’intégrer le « bermuda grass » sur le terrain monégasque. Dans cette interview, il nous explique qu’il y a 35 ans, après avoir essayé de nombreuses variétés de bermuda grass, il a mis en place un système où il a pris des stolons et les a fait pousser dans des petits poquets.Le semis en poquets est une technique qui consiste à semer en ligne à l’aidede petits trous creusés à distance régulière et non en traçantun sillon.3 à 6 graines y sont disposées et un ou deux plants, parfois plus,sont conservés après la levée.
Puis, Franck Nicolasa pris ces poquets et en a mis 35 au mètre carré. Sauf qu’à cette période, il y a 35 ans :
« Aucune machine n’existait pour réaliser une telle tâche » explique-t-il. C’est alors que le pitch manager de l’AS Monacoa décidé de « créer un système a l’aide d’un rouleau traditionnel sur lequel il a fait souder des emporte-pièces à la forme de picots qui font 6 cm de profondeurpour 3 cm de larges et qui font 35 trous au mettre carré. Il se met en place lors de la période de transition estivale lors du rasage du ray-grass et c’est à ce moment que l’on va passer le rouleau et, parallèlement,nous allons réaliser des bandes de traversavec le produit de traçage, soit 110 bandes d’un mètres de long. Ce travail s’est effectué avec 40 intermédiaires dont des stadiers, ce qui fait 2 aller-retours par personne et 230 000 poquets sur la pelouse effectué en deux jours et demi. Ce travail extraordinaire a donné de bons résultats puisque le gazon a tout de suite poussé et en plus cela a été très convivial. Pour entretenir ces poquets, il faut rajouter une couche de sable et arroser abondamment pendant 10 jours jusqu’à ce que la racine se développe et après il faut couper l’arrosage et c’est à ce moment que le bermuda prend tout son pouvoir de végétation maximum. Le bermuda a besoin de chaleur et de manque d’eau« .
Franck Nicolas présente ensuite le système de chauffage et d’arrosage :
« il y a un réseau de 18 km de tuyaux reposant sur de l’argile expansée à 11 cm en dessous de la surface. Quant ausystème d’arrosage, il se compose de 35 arroseurs répartis en 15 cercles pleins, 4 quarts de cercle et 16 demis cercles. Ces arroseurs sont agréés par la LFP.Il existe un paradoxe au Stade Louis II et il se trouve justement au niveau du système de chauffage et celui de l’arrosage puisque le terrain se retrouve au-dessus d’un parking. Cela comporte des avantages mais aussi des inconvénients.L’avantage c’est que notre stade est très drainant puisqu’il se situe justement au-dessus d’un toit et c’est beaucoup plus facile de drainer l’eau. Mais en revanche, pour apporter une couche de sable ou pour mettre en place le système d’arrosage et celui du chauffage, c’est difficile car il n’y a pas assez de profondeur. Il faut donc faire très attention lorsque nous travaillonsavec des pointes car elles peuvent accrocher les tuyaux du chauffage et cela peut causer des inondations … Nous avons mis en place ce système de chauffage pour améliorer nos phases de transitions végétales« .
Enfin, il revient sur l’épisode de la pyriculariose qui a attaqué plusieurs fois la pelouse du Stade Louis II, longtemps considérée comme ayantété la risée de beaucoup de clubs de partout dans le monde:
« Lorsque nous sommesattaqués par une maladie, il existe plusieurs façons de s’en sortir. Soit nous la traitons, soit nous sommes morts, soit nous évitons qu’elle arrive. Moi je suis partisan de la troisième décision car, dans un premier temps, c’est dans les intérêts de la Principauté de Monaco car le prince Albert est un grand défenseur de l’environnement.Cependant, lorsque nous sommes attaqués par la pyriculariose, nous sommes très embêtés puisque quand vous n’avez pas de températures qui baissent et avec deux ou trois lessivages par de l’eau de pluie, vous pouvez faire tout ce que vous voulez, mais justement,il n’y a pas grand-chose à faire… Soit il faut beaucoup traiter, soit il ne faut plus arroser mais la pelouse séchera et donc le terrain sera dans un très mauvais état, soit vous continuez d’arroser mais vous allez accélérer le développement de la maladie… Auparavant, nous les traitions directement car nous avions des produits avec des spectres très larges capables de soigner tout type de maladie. Ce n’est plus le cas aujourd’hui puisque nous utilisons de moins en moins de produits chimiques et ce type de maladie se déplace au gré des vents plus facilement. C’est pour cela que la stratégie du bermuda grass est une bonne stratégie car le terrain n’est jamais mouillé, il est toujours sec,il n’est donc pas spongieux, ce qui empêche le développement demaladies« .
Franck Nicolas termine par donner un conseil à ses confrères :
« Il vaut mieux un travail plus important mécaniquement car nous devons importer d’autres variétés plutôt que d’essayer de lutter contre l’environnement avec des produits chimiques ».
redaction.gsph24profieldevents.com (Lucas Sanseverino)