JO 2024 : Faut-il s’inquiéter pour les pelouses de Ligue 1 et Ligue 2

Publié le 25 juillet 2024 à 07h00

Catégorie : Actualités

Les tournois olympiques masculin et féminin de football des Jeux Olympiques 2024 se dérouleront du 24 juillet au 10 août dans 7 stades différents. Une compétition qui vient garnir un agenda déjà bien rempli pour des pelouses ayant enchainé la Coupe du monde de rugby, la Ligue 1 ou Ligue 2 et maintenant les JO. Faut-il s’inquiéter ?

Ce n’est pas tous les jours que la France accueille les Jeux Olympiques. Pour accueillir un tel événement, les meilleures infrastructures ont été sélectionnées. Les tournois olympiques masculin et féminin de football se disputeront ainsi dans 7 stades. La compétition représente au total 28 équipes et 58 matchs en 18 jours, soit plus de 3 matchs par jour en moyenne. Les 7 pelouses retenues vont donc être fortement sollicitées à une période de l’année charnière, et ce juste avant la reprise de la Ligue 1 et de la Ligue 2. Alors, faut-il s’inquiéter pour les pelouses françaises ? La question est d’autant plus légitime que 6 des 7 stades hôtes de la compétition ont également accueilli des matchs de la Coupe du monde de rugby 2023 entre septembre et octobre. Une très longue saison est sur le point de s’achever pour ces pelouses avec les JO, mais tireront-elles la langue à l’approche de la reprise des championnats ?

 

Les 7 stades accueillant le fooball aux JO :

      • Parc des Princes, Paris
      • Groupama Stadium, Lyon*
      • Orange Vélodrome, Marseille*
      • Matmut Atlantique, Bordeaux*
      • Allianz Riviera, Nice*
      • Stade Geoffroy-Guichard, Saint-Etienne*
      • Stade de la Beaujoire, Nantes*

*Stades ayant accueilli la Coupe du monde de rugby.

 

Pourquoi faut-il s’inquiéter ?

Les tournois olympiques auront lieu du 24 juillet au 10 aout, en pleine trêve estivale pour les championnats de football. Les 28 délégations se disputeront l’or, l’argent et le bronze pendant que les clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 préparent la saison loin de leur base. La reprise de la Ligue 1 est prévue pour le 18 août. Les délais vont donc être très courts pour remettre en état les pelouses en vue du championnat.

D’autant plus qu’il y aura matière à travailler aux vues de la fréquentation des pelouses durant les Jeux Olympiques. Certains stades vont accueillir de multiples rencontres en un laps de temps très court. Le Parc des Princes par exemple, va accueillir à deux reprises deux matchs le même jour (le 24 et le 30 juillet à 15h et 21h). Idem pour Bordeaux le 27 juillet. L’antre du PSG va au total accueillir 10 rencontres en 18 jours ! Pour celle des Bordelais, ce sera 7 matchs. A noter que le Groupama Stadium de l’OL sera le stade le plus sollicité avec 11 rencontres au total.

D’ordinaire, les gestionnaires de pelouses profitent de la trêve estivale pour réaliser la rénovation des terrains (scalpage, aération, malaxage, opérations mécaniques, semis ou placage…) Mais avec un calendrier sportif très chargé et une saison estivale marqué par la tenue de nombreux concerts, le timing est trop juste pour pouvoir réaliser ces travaux.

Sur les 7 stades qui accueillent la compétition, 6 ont accueilli des rencontres lors de la Coupe du monde de rugby entre septembre et octobre 2023. Une compétition qui a mis à rude épreuve le gazon, compte tenu des impacts que suscitent la pratique du rugby au niveau élite (intensité des appuis, mêlées, touches, etc). Pour ces pelouses, les pauses ont été courtes : il y a eu la trêve hivernale et un début de trêve estivale, entre le 18 mai (fin de la Ligue 1) et mi-juillet avec le début des JO. Certaines pelouses, comme celles de Bordeaux ou de Marseille, ont accueilli d’autres événements sportifs avec les phases finales de Top 14, tandis que d’autres ont accueilli des concerts (Stade de Lyon et de Nice) réduisant encore plus la marge de manœuvre pour préparer au mieux la compétition.

Bien que l’été ne se soit pas encore montré trop rude, il semblerait que les températures soient à la hausse et plus en adéquation avec les moyennes de saison depuis la mi-juillet. Si une sécheresse ne devrait pas être d’actualité étant donné les nombreuses précipitations qu’a connu la France, les conditions météorologiques actuelles pourraient être propices à l’apparition de certaines maladies du gazon telles que la pyriculariose. L’agent pathogène Pyricularia oryzae peut se développer lorsque les températures sont situées entre 25 et 30°C et que le taux d’humidité est important. Des démarrages d’épidémie ont été observés, et l’arrivée d’une pyriculariose en pleine compétition serait un véritable coup dur pour les pelouses. L’enchainement des matchs rendraient toute intervention impossible avant la fin de la compétition. Et démarrer la saison avec un gazon malade pourrait entraîner des répercussions importantes sur la suite de la saison.

Avec ce rythme de matchs effrénés, la pression va être sur les épaules des gestionnaires de pelouse et de leurs équipes. Les terrains seront scrutés aussi bien pendant les Jeux Olympiques que lors de la reprise des championnats. Et comme souvent, le personnel d’entretien des pelouses pourrait être le premier pointé du doigt en cas de défaillance. Malgré ces arguments, plusieurs éléments forcent à l’optimisme et la tenue de ces Jeux Olympiques sur les pelouses françaises ne devraient pas avoir un si grand impact sur le championnat.

 

Pourquoi ne faut-il pas s’inquiéter ?

Si la question de l’impact de ces Jeux Olympiques sur la qualité des pelouses pour la Ligue 1 et la Ligue 2 (voire National si Bordeaux est rétrogradé) est pertinente tant le gazon va être intensément sollicité, plusieurs arguments se veulent rassurants.

En premier lieu, le savoir-faire de la filière française. En attestent les classements des pelouses à l’issue de cette saison. Plusieurs stades ayant accueilli la Coupe du monde de rugby en début de saison se sont retrouvés plutôt bien classés dans les classements des pelouses établis par la Ligue de Football Professionnel (LFP). Le bon élève Saint-Etienne (voir ci-dessous) a même terminé en tête du classement des pelouses de Ligue 2. Le Matmut Atlantique a terminé à la 8e place avec une note de 16,6. En Ligue 1, si les pelouses du Groupama Stadium et du Vélodrome sont classées « seulement » à la 13 et 12e place, toutes les pelouses retenues ont obtenu d’excellentes notes (minimum 16). Bien que ce classement ne soit qu’un titre indicatif, il témoigne tout de même d’un savoir-faire et d’une expertise certaine sur les sites sélectionnés.

Chaque équipe d’entretien a intégré les Jeux Olympiques dans son planning d’entretien. Tous n’ont pas abordé la même stratégie, mais ils ont en commun d’avoir l’objectif de présenter la meilleure pelouse possible pour leur club résident dès les premières journées de championnat. Le cas de Saint-Etienne, plus longuement expliqué ci-dessous, en est l’exemple. A Lyon et à Marseille, les Jeux Olympiques se disputeront sur un gazon plaqué juste avant la compétition, ou presque. Au Stade de Marseille, la pelouse a été remplacée juste avant la finale de Top 14, qui avait lieu le 28 juin, par un PlayMaster. La pelouse sera ensuite changée à nouveau pour le début de saison de Marseille  en Ligue 1. A Lyon, une option de placage a également été posée après la compétition si besoin. L’impact sur la pelouse devrait donc être faible si le placage choisi est lui aussi hybride. Ces changements de pelouse ont également été anticipés depuis de longs mois, et il a fallu mener quelques opérations afin d’aider ces nouveaux gazons à s’implanter au mieux avant la compétition. A Marseille, les équipes d’entretien ont profité de la période entre la finale du Top 14 et de la HCup (tournois de football entre quartiers de la cité phocéenne dont les finales ont eu lieu au Vélodrome le 30 juin) et le début des JO pour multiplier les opérations mécaniques sur la jeune pelouse sans toutefois la stresser. Le but étant d’avoir un gazon certes jeune mais résistant pour la durée de la compétition.

Source : Mars360

Comme déjà évoqué, les conditions météorologiques ne sont pas alarmantes. Les inquiétudes auraient pu être bien plus grandes si les JO s’étaient tenus un été aussi brulant qu’en 2022. Les nappes se sont globalement bien rechargées et les pelouses sportives devraient avoir de l’eau.

En outre, le facteur multiplication des matchs peut être une véritable source d’inquiétude pour les gestionnaires de pelouses tant le gazon va être intensément sollicité. Le plus dur ne semble pas de fournir d’excellentes pelouses pour les JO, une mission déjà quasiment réussie tant les retours de la FIFA, chargé de contrôler la qualité des pelouses, sont positives, mais plutôt d’aborder sereinement la reprise de la Ligue 1 et de la Ligue 2 sur des pelouses qui auront connu une activité inhabituelle à cette période de l’année. D’une part, l’avenir décidera si les stratégies d’anticipation ou de changement de pelouse se sont avérées payantes. D’autre part, la courte période entre la fin des tournois olympiques et les premiers matchs de championnat au sein des stades ayant accueilli la compétition s’annonce décisive. Malgré l’enjeu, certains se montrent confiants, comme c’est le cas au Stade Geoffroy Guichard.

 

Les JO, dernier baroud d’honneur pour l’excellente pelouse de Saint-Etienne

A l’instar du Matmut Atlantique, le Stade Geoffroy Guichard a connu une saison riche ! L’antre des Verts a notamment accueilli 4 matchs de la Coupe du monde de rugby entre septembre et octobre 2023, en plus des matchs de l’ASSE. La saison de Ligue 2 s’est prolongée jusqu’à fin mai avec les barrages, qui se sont ponctués par la remontée des Stéphanois en Ligue 1. S’est ensuite ajouté à cela une rencontre qualificative à l’Euro 2025 de l’équipe de France féminine face à l’Angleterre (défaite 2-1) le 4 juin. Et la saison n’est pas encore terminée pour la pelouse des Verts, qui va accueillir encore 6 matchs olympiques en 8 jours, entre le 24 et 31 juillet ! « Nous sommes sur une très grosse densité de matchs, même s’il y a une alternance hommes/femmes et que le football féminin sollicite un peu moins la pelouse. Les pelouses vont être très sollicitées cet été », reconnait Marianne Petiot, directrice du Stade Geoffroy Guichard. Pas de quoi être inquiète toutefois. Cette programmation a été anticipée. Et l’objectif a toujours été clair : disputer la Ligue 2, la Coupe du Monde de rugby et les Jeux Olympiques sur la même pelouse, sans la remplacer.

« Nous ne sommes pas inquiets quant à la tenue de notre pelouse puisque nous travaillons à son maintien depuis la Coupe du monde de rugby », ajoute-t-elle. Un travail qui s’est jusque là plus que bien déroulé, en atteste le titre de meilleure pelouse de Ligue 2 obtenu par l’équipe d’entretien de Geoffroy-Guichard. Si tout est planifié et anticipé depuis de nombreux mois, la seule inquiétude pourrait venir de l’apparition de certaines pathologies, telles que la pyriculariose, en pleine compétition. « Le risque qu’il y a sur les pelouses pendant les Jeux est le départ de maladie. Nous n’avons pas d’arrêté sécheresse et très peu de risques d’en avoir sur Saint-Etienne. Si nous avions un départ de maladie en début de compétition, nous ne pourrions pas nous permettre de traiter. C’est une inquiétude qui existe. Pour autant, nous avons mis en place des plans de contingence afin d’anticiper tous les risques. Tout est très cadré. La pelouse est soumise à des tests PCR presque quotidiennement. Nous suivons tout risque potentiel de départ de maladie », explique-t-elle.

Après la compétition, l’équipe d’entretien de Saint-Etienne Métropole aura 3 semaines pour remettre en état la pelouse sur les zones dégradées. Le premier match à domicile des Verts en Ligue 1 a été programmé le 25 août. « Nous aurons le temps de remettre la pelouse en état d’ici le début de la saison, j’ai confiance en mon équipe et en les moyens dont nous disposons », affirme la directrice du stade. Dans son approche de l’événement, l’équipe stéphanoise n’a pas considéré les Jeux Olympiques comme une fin en soi mais plutôt comme une énième étape avant le retour du championnat.

Entre-temps, la pelouse du Stade Geoffroy-Guichard sera remplacée après deux journées de Ligue 1. Au total, elle aura accueilli 32 matchs au cours de la saison, le tout sans travaux structurant. « Nous ne pouvions pas prendre le risque de faire ces travaux et de stresser le gazon dans un tel calendrier par soucis de maladies. Nous voulions une pelouse robuste, avec un bon enracinement, plus résistante qu’une jeune pelouse », ajoute la technicienne. Dès le 15 septembre, après la réception de Lille pour le compte de la 4e journée de Ligue 1, la pelouse sera scalpée et remplacée par un Lay & Play qui sera alors opérationnel pour le 6 octobre et la venue d’Auxerre. D’ici là, les inquiétudes concernant la qualité des pelouses auront eu le temps d’être dissipées, ou pas.

Corentin RICHARD

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