Prévention : gare à la pyriculariose [2/2]
Publié le 18 mai 2018 à 10h32
Catégorie : Pratiques
Si l’épidémio-surveillance est un bon mode de prévention des maladies du gazon, elle se heurte à un obstacle de fond : le manque de remontées d’information…
La pyriculariose est une maladie qui fait l’actualité pour les raisons développées dans notre précédent article, mais pas seulement. La pyriculariose fut en effet l’un des sujets abordés lors d’un récent colloque dont l’Anses (l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) était l’un des co-organisateurs («Impact du changement global sur l’émergence des maladies et des ravageurs des plantes en Europe», les 23 et 24 avril derniers à Paris). Relatée par nos confrères du Journal de l’Environnement, la conférence est notamment revenue sur les modes de prolifération possibles de Pyricularia grisae du ray-grass anglais vers d’autres cultures, telles que le blé ou le riz. Si le titre de l’article est volontairement accrocheur – c’est de bonne guerre – , il a tendance à dramatiser la situation, présentant Pyricularia grisae comme un péril pour les cultures de blé et de riz, et dont les stades de football seraient les incubateurs ! Un tel scenario catastrophe ne convainc aucun des experts contactés par gsph24.com.
À commencer par Didier Tharreau, chercheur à l’unité mixte de recherche BGPI (Biologie et génétique des interactions plante-parasite, Montpellier), qui avait notamment contribué à isoler la souche présente sur le stade de la Mosson : « Que le parasite dissémine hors des stades et aille infecter des plantes cultivées est une hypothèse relativement peu probable, car les stades restent des milieux confinés. En revanche, que le pathogène présent sur le ray-grass des stades touche ensuite le raygrass des mauvaises herbes à l’extérieur puis s’étende petit à petit est une hypothèse qu’il ne faut pas totalement écarter, même si cette probabilité est relativement faible. »
Didier Tharreau regrette toutefois le manque d’informations permettant de faire une étude épidémiologique exhaustive de la pyriculariose. « Ce qu’on ne sait pas, c’est d’où viennent les souches responsables des maladies diagnostiquées dans des stades ». Selon lui, le grand nombre de parties impliquées dans la gestion des stades – propriétaires, clubs, prestataires, consultants, ainsi que les instances sportives, en l’occurrence la LFP – participe de cette complexité. « Ce que je regrette c’est que la pyriculariose a bien été identifiée à plusieurs reprises, mais très peu de personnes ont rapporté cette information. » Et ce dernier de citer néanmoins le bulletin édité par le réseau d’épidémio-surveillance Ecoumène signalant le cas de pyriculariose à Monaco, dès 2015.
Justement Ollivier Dours, animateur du réseau Ecoumène au sein de l’Agref est également cité dans l’article du Journal de l’Environnement, où il déplore lui aussi ce manque dans la remontée d’informations. « Je persiste et signe, confie-t-il à gsph24.com, même si, encore une fois, il ne s’agit pas de tirer les oreilles des intendants de terrains. Il faut au contraire faire » baisser la pression« . Ce qui importe encore une fois, c’est obtenir les informations nécessaires à une épidémio-surveillance plus efficace. »
crédit photo: Hervé Cochard