STRI : Comment le changement de législation affectera-t-il les gestionnaires de gazon et les greenkeepers ?
Publié le 30 avril 2024 à 07h00
Catégorie : Paroles d’experts
Le Dr Christian Spring, scientifique principal du STRI (Sports Turf Research Institute), revient sur l’impact qu’aura la nouvelle législation européenne sur l’industrie de l’entretien des pelouses sportives et des golfs. Le STRI, de son côté, réalise des recherches sur la gestion intégrée.
Le Royaume-Uni garde un oeil attentif sur la situation en Europe. La filière tend vers une réduction de l’utilisation de produits chimiques et de pesticides sur les terrains de sport, et les groundsmen et greenkeepers doivent s’adapter à ce nouveau défi : garder des surfaces de grande qualité de manière durable, avec moins de ressources.
Le Dr Christian Spring, scientifique principal du STRI (Sports Turf Research Institute), dans un article paru sur le site du STRI, rappelle que la Commission européenne « s’est engagée à réduire de 50 % l’utilisation et les risques des pesticides chimiques, ainsi qu’à réduire de 50 % les pesticides plus dangereux ». Elle encourage la gestion intégrée des ravageurs, des maladies et des mauvaises herbes.
De par son rôle important dans la filière, le STRI a été missionné par l’UEFA (Union des associations européennes de football) et l’EGA (European Golf Association) de mener des recherches et de réaliser un rapport d’évaluation d’impact sur la réduction des produits phytopharmaceutiques, et de partager des informations concernant les meilleures pratiques de gestion intégrée des gazons (ITM : Integrated Turf Management). « L’analyse d’impact a examiné comment le retrait des produits phytopharmaceutiques (PPP) aurait affecté le gazon et sa gestion, tout en présentant une vision équilibrée de la manière dont l’ITM est utilisé par les gestionnaires de gazons sportifs et de ce qui serait nécessaire pour poursuivre sur la voie de nouvelles réductions des PPP », indique Christian Spring.
Un impact hors UE ?
Pour le scientifique du STRI, l’évolution de la législation relative à l’usage des PPP ne va pas seulement impacter les pays européens. « Les pays extérieurs à l’UE ressentiront également les impacts indirects des réglementations européennes en raison de la réduction potentielle de la taille du marché des PPP, limitant ainsi la mise sur le marché de nouveaux produits et ceux qui seront disponibles pour application », indique-t-il. Selon lui, les gestionnaires de gazon devront mettre en place des approches de gestion intégrée à long terme pour produire et entretenir des surfaces de qualité.
Les leviers de la lutte intégrée
La gestion intégrée consiste à trouver « l’équilibre naturel entre l’environnement du sol, la biologie et le surface de jeu », dans le but, ici, de produire des surfaces sportives de qualité. Dr Christian Spring estime qu’il y a 5 leviers à actionnables par les gestionnaires de gazon dans le cadre de la lutte intégrée.
Le premier est la prévention, qui consiste à identifier les causes profondes d’un problème et à les résoudre. « Cela signifie souvent créer un environnement de croissance sain pour le gazon et garantir que le gazon soit solide et robuste », précise-t-il.
Le second est le levier cultural. « Il existe un large éventail de pratiques culturales qui peuvent aider à prévenir les ravageurs, les mauvaises herbes et les maladies qui affectent le gazon. Celles-ci tournent souvent autour du respect des meilleures pratiques d’entretien du gazon, telles qu’une application appropriée d’engrais (ni trop, ni trop peu et avec des apports judicieux lorsque la plante en a besoin), des pratiques d’irrigation (apport d’eau optimal pour garder la plante en bonne santé, mais pas trop ou trop peu). sous l’eau) ou choix de variétés de graminées plus tolérantes ou résistantes là où des problèmes sont connus », ajoute le scientifique du STRI.
Le troisième est le levier physique. Les opérations mécaniques ont un impact physique sur l’environnement de culture, « elles fournissent une barrière ou un autre obstacle physique à un ravageur, une mauvaise herbe ou une maladie », poursuit-il.
Les solutions biologiques sont le quatrième levier. L’utilisation de nématodes ou de produits de biocontrôle permettent peuvent d’aider à repousser les ravageurs, contrôler/inhiber les agents pathogènes fongiques. « Les produits biologiques continueront de gagner en importance dans la gestion du gazon. Il s’agit probablement du type de solutions que les législateurs permettront aux gestionnaires de gazon de continuer à utiliser dans les années à venir », estime le Dr Christian Spring.
L’ultime solution demeure les contrôles chimiques, ou les produits phytopharmaceutiques, bien que « l’objectif est de réduire la nécessité de devoir les utiliser », conclut-il.
Les conseils du Dr Spring pour l’avenir
« Il est essentiel que l’industrie du sport prenne son avenir en main et montre la voie en matière de gestion intégrée et de gestion du gazon avec une utilisation minimale des PPP.
Le changement est là et nous devons y faire face et planifier les changements futurs. Attendre et ne rien faire n’est pas une option et la pensée critique est essentielle. En tant qu’industrie, nous devons collaborer avec toutes les parties prenantes, y compris les régulateurs et les législateurs. Nous devons démontrer le bon travail effectué par les gestionnaires de gazon et, surtout, nous devons être en mesure de quantifier les actions visant à réduire l’utilisation des PPP. Évaluez le problème, mettez en œuvre un plan, surveillez l’efficacité, examinez et ajustez si nécessaire.
Des solutions existent pour lutter contre les ravageurs des plantes, les mauvaises herbes et les maladies. Ils n’auront pas l’effet unique d’un PPP mais, combinés, ils constitueront la manière dont l’ITM devra être pratiqué. Travailler avec l’environnement naturel est en fin de compte la clé. »